A propos des vannages
Le fonctionnement des vannages
Alors que nous venons de subir une inondation majeure, avec des dégâts considérables et des plaies à panser, je voulais revenir sur un sujet très secondaire mais qui alimente souvent des polémiques bien inutiles.
Historiquement, chaque moulin du grand-morin avait son barrage pour maintenir une chute d’eau et ainsi alimenter sa roue. Le vannage permettait de gérer la hauteur d’eau mais aussi, pour les plus larges, de laisser passer les bateaux.
De nos jours, les vannages qui subsistent et qui sont encore manœuvrables sont utilisés pour maintenir le niveau de l’eau. Ainsi à Crécy, le vannage de Saint-Martin permet de maintenir de l’eau dans les brassets qui seraient à sec sans cela. De manière générale ils permettent en gardant un niveau haut de conforter les berges.
Quand l’eau monte on les ouvre afin d’éviter des débordements lors des petites crues.
Parlons hydraulique et chiffres. Le débit qui représente la quantité d’eau qui transite par la rivière augmente de l’amont vers l’aval. En dehors des crues le débit reste en dessous de 10m3/s voire beaucoup moins. Lors des crues on dépasse les 100, voire plus (173 lors de la dernière crue). La rivière permet de passer 80m3/s sans déborder. Ainsi, en dehors des crues, vannes baissées on aurait un filet d’eau dans la rivière, les berges inutiles finiraient par s’affaisser. On n’aurait plus la capacité de faire passer autant de débit. C’est la raison technique qui permet de maintenir le niveau haut. D’autres raisons sont évoquées comme la navigabilité, le tourisme et le patrimoine. Que serait la Venise briarde sans ses brassets en eau !
Quand faut-il ouvrir les vannes et pourquoi ?
On l’a dit plus haut, la rivière vannes ouvertes est capable de laisser passer 80m3/s sans déborder. Si on laisse les vannes fermées, on inonde par la rue de la halle dès 50m3/s, une inondation qu’on peut donc éviter. L’ouverture s’effectue en deux temps :
– En premier les vannes à l’aval de Esbly jusqu’à Crécy, avec pour Crécy les vannes du moulin Nicol, du quai des tanneries et de Penthièvre
– En second lieu le moulin de Saint-Martin.
En pratique, compte tenu des crues fréquentes, on laisse ouvert le quai des tanneries tout l’hiver comme ce fut le cas l’an dernier.
On a défini des seuils maximum de déclenchement des 2 phases d’ouverture, 25m3/s pour la première phase, 45 pour la seconde.
Néanmoins, pour avoir une marge de sécurité suffisante, chaque fois que possible la première phase est opérée avant l’arrivée de la crue. Les opérations de cette première phase mettent moins d’une demi-journée. Sur un vannage, la rivière en amont est vidée en général en une heure. L’arrivée de la crue est surveillée au travers de ce qui se passe en amont via les balises de Vigicrues. Dans le cas de fortes pluies annoncées, on va même jusqu’à ouvrir avant la pluie.
Une question souvent posée : pourquoi ne pas ouvrir plus tôt encore ? Les explications données plus haut sur la nécessité de conserver une rivière pleine s’appliquent. Le fait de vider préventivement la rivière n’apporte pas grand-chose en terme d’hydraulique, le niveau étant très vite rattrapé, sinon de rassurer les riverains, l’effet étant surtout psychologique.
Et une fois les vannes ouvertes, on n’a pas d’action possible pour éviter les inondations importantes comme hélas on en a connu.
Les polémiques
On entend parfois dire qu’on manœuvrerait nos vannes pour protéger Paris. Nous n’avons pas de telles prétentions ! Il n’existe pas de grand barrage sur le grand-morin qui aurait de tels pouvoirs. Si cela existait croyez-bien qu’on les utiliserait pour se protéger. Nos petites vannes n’ont qu’un impact sur le bras de rivière juste en aval. Dans l’heure qui suit l’ouverture, le débit a retrouvé son niveau. Entre Crécy et Paris, il y a la Marne, et tant de seuils, de grands barrages et de kilomètres de rivières ! Et serions-nous à ce point masochiste pour s’inonder nous-mêmes (j’ai moi-même été particulièrement inondé ces derniers jours). On ne sait pas trop d’où sort cette théorie du complot qui a pris de l’ampleur cet été sous prétexte de jeux olympiques. Comme quoi, les mensonges se propagent toujours plus vite que les vérités.
Qui pilote les vannages ?
Les vannages appartiennent à des propriétaires privés ou publics (communes). Les manœuvres sont effectuées soit par les propriétaires soit par les services techniques des mairies. Une coordination pilotée par les élus gère ouverture et fermeture. Historiquement, du temps du syndicat du grand-morin, la coordination fut assurée par M Houel puis Mme Ravet. M Carouge pris la suite, je l’ai ensuite remplacé. Tous les intervenants partagent l’information et les instructions via un groupe Whatsapp, ou à défaut échangent par téléphone.
Jean-Michel Sagnes
Responsable de la coordination des vannages de l’aval du grand-morin
1er Adjoint à la mairie de Voulangis – Vice-Président du Smage des 2 Morins